Face à une notion scolaire, les élèves disposent de conceptions intuitives, issues de leur vie quotidienne.

 

L’analogie de substitution

Ainsi, pour ce qui est des quatre opérations : l’addition est conçue comme une recherche de gain et la soustraction comme une recherche de la quantité restante à l’issue d’une perte ; la multiplication est conçue comme une addition répétée et la division comme la recherche de la taille de la part dans le cadre d’un partage équitable.

Ces conceptions intuitives sont qualifiées d’analogie de substitution, dans la mesure où ce sont des connaissances issues de la vie quotidienne qui se substituent aux conceptions scolaires. Elles coexistent avec d’autres conceptions intuitives – de scénario et de simulation – qui seront abordées par la suite.

Dans certains contextes, ces conceptions intuitives permettent d’aboutir à la solution pour un élève, mais dans de nombreux autres elles sont insuffisantes et se restreindre à elles limite grandement la possibilité de résolution des élèves puisqu’il ne s’agit que d’une facette de l’opération concernée. Comment un élève peut-il alors réussir à résoudre les problèmes suivants ?

• Ce matin, Louise arrive avec des billes à l’école. À la récréation, elle perd 4 billes. Il lui reste 7 billes. Combien de billes avait-elle ce matin ?

• Pablo a 3 billes. Il gagne des billes à la récréation. Maintenant, il a 9 billes. Combien de billes a-t-il gagnées ?

Un∙e élève qui réussit à résoudre ces problèmes montre qu’il∙elle a acquis des conceptions abstraites des opérations. En effet, s’il∙elle se limite à ses conceptions intuitives, il∙elle rencontre des obstacles dans la résolution de ces problèmes. Pourquoi ?

Le premier problème ne décrit pas une situation de gain, mais de perte. Donc si l’addition n’est comprise que comme la recherche de la quantité obtenue à l’issue d’un gain, le problème ne peut être résolu. Pour le résoudre, il est nécessaire de concevoir l’addition plus largement comme recherche d’une totalité.

Le deuxième problème ne décrit pas une situation de perte, mais de gain. Donc si la soustraction n’est comprise que comme recherche du résultat à l’issue d’une perte (qu’est-ce qui reste ?), le problème ne peut être résolu par une soustraction. Pour le résoudre par une soustraction, il faut donc avoir conçu la soustraction comme recherche d’un écart.

Ces énoncés sont donc discordants avec un certain type de conception intuitive, celle de substitution. Leur résolution n’est donc pas intuitive. À cette première forme de conception intuitive s’ajoutent deux autres types de conceptions intuitives, présentées ici brièvement : les conceptions intuitives de scénario et celles de simulation mentale.

 

L’analogie de scénario

Par exemple, le problème « J’ai 6 pommes et 3 paniers. Combien ai-je de pommes par paniers ? » est concordant avec le scénario intuitif de la division car il y a une relation fonctionnelle de contenu à contenant entre les objets (« pommes » et « paniers »). Au contraire, « j’ai 6 pommes et 3 oranges. Combien de fois plus ai-je de pommes que d’oranges » est discordant avec le scénario intuitif de la division car les objets ont un statut symétrique (deux sortes de fruits).

 

L’analogie de simulation mentale

Concernant la simulation mentale, le problème « Je construis 3 tours de 9 cubes. Combien ai-je de cubes ? » est qualifié de concordant dans la mesure où l’élève peut le résoudre en réalisant mentalement une addition répétée (9 + 9 + 9). En revanche, le problème « Je construis 9 tours de 3 cubes » est discordant avec la simulation mentale : l’élève ne parviendra pas à résoudre mentalement 3 + 3 + 3 + 3 + 3 + 3 + 3 + 3 + 3. Pour résoudre ce problème, il lui faudra réaliser une multiplication (3 x 9).

Les Modules 3 et 4 comportent des problèmes concordants et discordants avec les trois conceptions intuitives. Ceci offre une large palette de problèmes qui se distinguent selon leur concordance ou discordance avec les trois types de conceptions intuitives. Les énoncés des Modules 3 et 4 permettent aux élèves de chercher à résoudre tous les types de problèmes, ce qui favorise le développement de leurs capacités de modélisation de problèmes et le sens profond des opérations.